02/04/2021
KRAS est l’un des premiers oncogènes (un gène qui favorise le développement du cancer) à avoir été découvert, il y a plus de 30 ans. S’il est muté dans environ 30% des cancers, cette mutation est particulièrement fréquente dans le cancer du pancréas, avec près de 95% de patients touchés. En l’absence de traitement efficace, ce cancer se soigne encore très mal aujourd’hui, et une meilleure connaissance du rôle de KRAS dans son évolution est nécessaire pour pouvoir arriver à mieux le traiter.
Il y a quelques années, lorsque le Prof. Jacquemin a commencé à travailler sur le cancer du pancréas, il a été surpris de découvrir qu’aucun anticorps permettant de détecter KRAS sur des coupes de tissus sains ou cancéreux n’était disponible. Or, cette capacité de détecter l’expression de protéines dans un tissu est un élément essentiel pour appréhender leurs rôles. Sans anticorps, comprendre les rôles de KRAS est donc plus compliqué. Pour pallier cette absence, son équipe a donc cherché à produire ses propres anticorps KRAS, mais les tentatives n’ont pas été couronnées de succès.
Face à ce constat, son équipe a alors développé deux nouveaux modèles de souris chez lesquelles KRAS (la version normale ou la version mutée) a été fusionné à une protéine fluorescente. Cela a permis de visualiser, pour la toute première fois, le patron d’expression de KRAS dans le pancréas et le cancer qui en dérive. Ces recherches ont été menées essentiellement par le Dr. Mohamad Assi, chargé de recherche au FNRS. Grâce à ces modèles, les chercheurs ont pu identifier que l’expression de KRAS, contrairement à l’idée courante, n’est pas exprimé par toutes les cellules du pancréas, mais seulement par un petit nombre de ces cellules. Lorsque le pancréas est enflammé, une condition qui constitue un évènement précurseur et un risque important du cancer du pancréas, la majorité de ces cellules pancréatiques exprime alors KRAS. Il en va de même pour toute une série de protéines essentielles à l’activité de KRAS, appelées effecteurs. Le fait que l’inflammation du pancréas permet à KRAS et ses effecteurs d’être exprimés explique pourquoi cette inflammation est essentielle à l’initiation du cancer du pancréas. Dans ce contexte, et en collaboration avec l’équipe du Prof. Mariano Barbacid à Madrid, ils ont montré qu’un de ces effecteurs, appelé C-RAF, jouait un rôle déterminant dans ce processus. Ces nouveaux modèles de souris ont donc permis d’identifier un mécanisme essentiel à l’initiation de cancer du pancréas, montrant l’intérêt de considérer le ciblage de l’expression des oncogènes comme une option thérapeutique.
Ces modèles de souris, qui ont été développés par la plateforme de transgenèse de l’Institut de Duve, seront utiles à l’étude d’autres types de cancers et de différents aspects du développement d’organes durant l’embryogénèse.
Article décrivant cette recherche
Cancer Res.
La presse en parle
LeSoir.be – Des recherches porteuses d’espoir contre le cancer du pancréas – 24/11/2021